La réalité du métier d'Ostéopathe Animalier (& Praticien Shiatsu, & Masseur Animalier)

Dernière M.A.J - Décembre 2020

Le texte qui suit est également valable pour les personnes souhaitant s'orienter en Masso-Physiothérapie ou Shiatsu Animalier. Désormais, ces professions sont soumises au C.N.O.V (Conseil National de l'Ordre des Vétérinaires), et pour pouvoir exercer légalement, il faut se soumettre à l'Examen d'Aptitude en Ostéopathie Animale (ouvert à partir  5 ans d'études supérieures aux personnes ayant des compétences en ostéopathie animale), sous peine de risquer 2 ans de prison et 30 000 € d'amende pour exercice illégal de la médecine vétérinaire. 

La formation initiale

Les écoles privées se font de plus en plus nombreuses, vantant chacune d’être à la pointe en matière de formation. Pourtant, peu d’étudiants parlent de leur formation et les avis mitigés sont donnés sous couvert de l’anonymat des forums. Pendant ma formation, j’ai contacté plusieurs ostéopathes issues de celle-ci, et pour beaucoup ce fut silence radio. Je ne vois pas ce qui a de mal à partager son expérience avec des futurs confrères. Malheureusement, à ce jour il y a très peu de collaboration entre professionnels du même secteur.

 

Depuis 2017, l'Ordre National des Vétérinaire a récupéré la légitimité de délivrance du diplôme d'Ostéopathe Animalier. De ce fait, pour pouvoir continuer à exercer, tous les praticiens en exercice doivent passer un examen afin de pouvoir être inscrit sur la liste de l'ordre qu'importe le nombre d'année d'expérience qu'ils ont. Cet examen était ouvert aux personnes ayant soit 3 années d'études supérieures (+ 1 200h/an) et 5 ans d'expérience sous assurance professionnelle et déclarés à l'U.R.S.A.F.F jusqu'au 1er Janvier 2020 (date de fin du moratoire), maintenant il est obligatoire de justifier de 5 années d'études supérieures (+ 1 200h/an). De plus, il est obligatoire d'être à l'aise sur le travail de plusieurs espèces car l'examen pratique se déroule sous forme de tirage au sort d'une espèce entre le chat, le chien, le cheval ou le bovin. De ce fait, toutes les formations actuelles et même celles qui délivrent le D.O.A ne peuvent garantir à leurs élèves de pouvoir exercer à la fin de leur cursus. Malheureusement, ces études sont très spécialisées, et donc la possibilité de reconversion si échec à l'examen est plus que réduite. C'est une question à envisager car le taux d'échec est pour le moment relativement élevé, bien que cela soit compensé par le fait que le nombre de passage par personne n'est pour le moment pas limité (ce qui risque d'évoluer dans le futur, et il faut également penser au coût des frais d'examen très élevés). Les formations qui se déroulent sur deux ou trois ans récupérant des clients car moins chères ne sont donc absolument pas légitimes. 

 

Concernant la prétendue sélection des écoles… Elle se fait d’abord au portefeuille (aucune aide financière n’est accordée par l’état pour la plupart des formations, exception peut-être faite pour celles qui délivrent le D.OA), il faut maintenant compter environ 50 000€ pour l'ensemble du cursus, et en moyenne 400€/passage pour l'examen théorique ordinal obligatoire ET 1 650 €/passage pour la pratique, également hors frais annexes comme transport/hébergement). Beaucoup d’écoles prétendent sélectionner leurs étudiants (baccalauréat scientifique, galop 7…) sur papier, alors qu’en pratique ce n’est pas le cas. Lors de ma formation,  on venait tous d’horizons différents (baccalauréat S, L, ES, STG, reconversion professionnelle, niveau équestre variable du débutant au cavalier confirmé). Dans beaucoup d’écoles, l’effectif par classe annoncé est inférieur à l’effectif réel, cela peut être handicapant en cours pratique. Au terme de la formation, peu d'élèves échouent (hors abandon du cursus), et le cas échéant, redoublent ou changent d'école. Il existe à ce jour 19 écoles d'ostéopathie pour animaux en France, la plupart ayant des promotions d'une trentaine voir une quarantaine d'élèves par année (soit 200 élèves par école continuellement). On peut donc aisément plus de 600 nouveaux ostéopathes animaliers par année, toutes formations confondues : désormais même les meilleurs aurons du mal à faire leur place sur le terrain (n'en déplaise à ces fameuses écoles qui vantent un métier en plein essor et aux revenus démesurés). L'examen de l'ordre des vétérinaires ne possède également pas de numérus clausus, en dehors des personnes dont le dossier n'a pas été accepté ou n'ayant pas les moyens financier de s'y présenter, il n'y a pas de régulation faite (notamment car il est pour le moment possible de le présenter autant de fois qu'on le souhaite, pourvu qu'on paie les frais d'examen ; encore une fois, la sélection par le portefeuille est là...). 

  

A cause de l'absence de numérus clausus et de la prolifération des écoles, la saturation est là...

 

Il ne s'agit pas de limiter l'accès au diplôme d'ostéopathie aux seuls titulaires d'un baccalauréat scientifique (comme cela se profile), mais de faire une vraie sélection sur les candidats au titre d'ostéopathe, par leurs compétences et connaissances, mais surtout par leur motivation et leur implication dans le métier, car c'est cela qui fera la différence sur le terrain. Espérons qu’un numérus clausus soit rapidement instauré afin de limiter la saturation du métier.

 

Lorsque vous cherchez votre future école, n’hésitez pas à faire un tableau comparatif avec les heures de formation annoncées, les matières enseignées, le prix à l’année, le type d’espèces traitées (canin, félin, bovin, équin doivent l'être obligatoirement) etc. Allez également aux portes ouvertes de celles qui vous intéressent, et essayez de rentrer en contact avec des étudiants et des anciens élèves de ces écoles. Regardez également la formation des professeurs : la plupart recrutent leurs anciens élèves, ayant parfois seulement une à deux années de pratique professionnelle voir moins de quelques mois ! A ce sujet, je trouve cela dommage. Il existe autant de techniques ostéopathiques que d’ostéopathe, et avoir des professeurs de formations différentes est plus enrichissant que ceux formés à la même méthode. Maintenant, les enseignants en ostéopathie animale doivent obligatoirement être inscrits au RNA et donc avoir réussi leur examen d'aptitude, sinon ils sont hors la loi.

 

 Il existe maintenant des formations par correspondance pour apprendre le métier. C'est évidemment une hérésie, cette discipline nécessite un apprentissage guidé, et pas quelques cours sur internet ! Ne succombez pas à la facilité... c'est vos patients qui en paieront le prix ! (Et votre réputation...)

 

Solution alternative aux écoles privées post-baccalauréat, vous pouvez toujours poursuivre un cursus vétérinaire et vous spécialiser ensuite dans l’ostéopathie. Cela vous assure une formation de haut niveau, un salaire convenable et une voie de réorientation au cas où. Vous pouvez également passer par un cursus d’ostéopathe humain, mais cela reste une voie plus risquée vu la conjoncture actuelle du métier (saturation) et vous ne serez pas dispensés de l'examen du C.N.OV malgré que vous soyez autorisés à exercer sur une patientèle humaine, et vous ne pourrez pas choisir seulement une espèce à traiter, vous devez être capable de manipuler aussi bien des chiens et chats que des chevaux ou des bovins.

 

Durant votre formation, vous serez certainement tentés de trouver un stage d’observation auprès d’un professionnel déjà installé. D’après ma propre expérience, cela relève souvent du parcours du combattant. Durant mes études, j’ai contacté plusieurs ostéopathes de ma région afin de les suivre quelques jours par mois dans leur pratique. Les rares réponses obtenues me proposaient de payer chaque jour de stage à des prix exorbitants (entre 200 et 400€ par jour), ou alors de me prendre en formation à condition d’un rachat de clientèle après mon diplôme. Il ne faut pas se leurrer, les clients ne sont jamais acquis, et ils ne peuvent encore moins être rachetés. Deux ont accepté de montrer leur façon de pratiquer sur quelques heures qui ont été très enrichissantes. Cela dit, les conventions de stages réalisés par les écoles ne correspondent pas non plus à la réalité du terrain (on ne fait pas d'horaires de bureau, et encore moins 35h) cela peut freiner les praticiens à prendre des stagiaires par rapport à l'assurance.  De plus, le nombre de demandes est très important chaque année par rapport au nombre de praticiens sur le terrain... Et à nouveau, tous les ostéopathes n'étant pas encore inscrits sur le RNA n'ont légalement plus le droit de prendre des stagiaire, ce qui limite fortement le nombre de professionnels disposés à prendre des stagiaires pour le moment (délai de passage de l'examen très long actuellement). J’ai pu acquérir de l’expérience grâce aux propriétaires qui m’ont fait confiance dès le début, en me laissant me faire la main sur leurs animaux. Sans cela, je n’aurai certainement pas avancé dans ma pratique.

         Les stages de perfectionnement post-gradué sont aussi rares que cher (pour deux ou trois jours, cela s’élève en général à 500€ minimum sans compter les frais annexes comme l’hébergement, le transport et la nourriture) : l’accès aux connaissances nécessite un portefeuille bien rempli.  Ces formations sont certes facultatives, mais certaines techniques ne sont pas enseignées en école ou alors elles ne le sont que partiellement. Par exemple, au cours de vos études il est possible qu’on vous forme soi-disant à la médecine traditionnelle chinoise et au shiatsu en vous donnant quelques points, leur emplacement et leurs effets thérapeutiques isolés, sans prendre la peine de vous enseigner les couplages et le ressenti. Sur le terrain, ces cours express ne valent rien, il vaut mieux se former dans une école spécialisée. Si vous souhaitez améliorer votre pratique, les stages post-gradués seront primordiaux. Et pour continuer à payer des formations onéreuses après avoir payer l’école, il faut être vraiment motivé (ou être soutenu par un mécène...). 

N'oubliez pas qu'un praticien compétent se forme tout au long de sa vie : dans ce domaine, rien n'est jamais acquis.

L'auto-entreprise

Pour se déclarer auto-entrepreneur, il faut passer par l’URSAFF. N’hésitez pas à prendre conseil auprès de personnes compétentes avant de vous déclarer, car en cas de problèmes c’est le branle-bas de combat pour faire réagir les différentes institutions qui s’occupent de votre dossier.

 

Les charges augmentent graduellement et assez rapidement. En septembre 2012, pour une consultation à 60€, on me demandait 12€ de charge. En janvier 2013, c’est passé à 13€. Et en juillet 2013, je suis à 15€, sans compter les impôts évidemment.. Lors de mon inscription je n’ai pas demandé l’ACCRE, pensant ne pas pouvoir en être bénéficiaire. Ceux qui la possèdent ont des charges très réduites sur les trois ans qui suivent leur début d’activité. L’avantage en étant ostéopathe animalier c’est que l’on travaille principalement en clientèle, du coup nous n’avons pas de crédit pour un local et l’investissement matériel est limité. Par contre, nous devons quand même nous acquitter chaque année de la Cotisation Foncière des Entreprises (C.F.E) pouvant aller du simple au double selon la domiciliation de l'entreprise et les revenus générés.

 

En ce qui concerne les assurances, il a été rendu obligatoire par l'Ordre des Vétérinaires de prendre une Responsabilité Civile Professionnelle. Les offres d'assurance sont de plus en plus nombreuses, mais elles restent relativement chères (entre 300 et 700 €/an selon la couverture choisie). En plus de cela, une fois l'examen d'aptitude réussi, il est obligatoire de s'affilier à l'Ordre des Vétérinaires (en moyenne 150 €/an). 

 

Il est très facile de se déclarer en auto-entrepreneur, mais pour réussir à faire pérenniser son activité c’est un autre domaine. Tout le monde n’est pas fait pour travailler à son compte. Cela signifie gérer sa propre comptabilité, son développement marketing (on peut tout à fait passer par des entreprises spécialisées, seulement un débutant a rarement le budget nécessaire), ses horaires… Quand un client se présente, on peut être amené à travailler à tout moment, notamment pour les urgences. Ce qui veut dire pas de vacances dans un premier temps, pas d’horaires de bureau non plus. Il faut également prendre en compte l’emploi du temps du client, qui travaille lui aussi, et qui ne peut être parfois disponible que le soir ou les week-ends. A ce moment là, quand l’entreprise marche, on en vient à ne plus calculer ses heures, et peu importe la météo, on travaille en extérieur par tout les temps.

 

Qu'importe le nombre d’année de pratique ou de cas traités avec succès, un praticien qui reste humain dans sa pratique (c'est-à-dire qui n’est pas intéressé que par les bénéfices commerciaux comme on peut malheureusement le voir parfois), se pose toujours certaines questions à la fin d’un soin. C’est là que le retour de la clientèle est très important. Beaucoup de personnes ne prennent pas la peine de donner des nouvelles dans les semaines suivantes pour confirmer l’amélioration (ou attendent que ce soit le praticien qui en prenne, néanmoins selon la proportion de clients dans le mois, c'est pas toujours évident de penser à tout le monde !), dans ce cas comment savoir si le client a été satisfait ? On reste dans le doute jusqu’à ce qu’il nous appelle pour une autre séance, plusieurs mois (ou années) après. Si une bonne réputation est lente à venir, la mauvaise a toujours un galop d’avance. Il suffit d’un client mécontent pour en perdre plusieurs. Bien que l’erreur reste humaine,  dans les professions de santé, on a obligation de moyen (mais pas de résultats...). Il ne faut pas oublier non plus que certains clients peuvent être de mauvaise foi (un trait humain...) et accuser le praticien pour des faits qui ne sont pas de son ressort (d'où l'importance d'être bien couvert par l'assurance professionnelle) ou parce qu'il faut toujours trouver un coupable à ses problèmes. Il y a également des clients peu fidèles ou jamais satisfaits qui changent régulièrement de praticien et qui n'hésitent pas à cracher sur l'ancien car c'est toujours le dernier qui a parlé qui a raison. Voir même des collègues sans aucun sens moral et sans aucune éthique professionnelle qui n'hésitent pas à cracher dans le dos de leurs "confrères" pour essayer de récupérer leur clientèle (bienvenue dans le monde merveilleux des professionnels de santé animale). Donc en plus d'une bonne assurance, il faut parfois aussi un bon psy ou un bon punching-ball quand on est au contact du genre humain :) (l'animal, lui, ne pose que rarement de problèmes, en dehors des potentielles morsures, griffades ou coups de pied perdus... liés soit à la douleur, soit à un manque certain d'éducation). 

 

Pour ce qui est de la question épineuse du marketing, les professions libérales non réglementes ne sont pas interdites de publicité. Pourtant, bon nombre d’ostéopathes s’offusquent de voir certaines de leur confrère en faire : d’après eux cela décrédibiliserait les professions de santé. Le problème n’est pas la publicité en soi (donner des cartes de visite à ses clients ou se présenter aux autres professionnels de santé est toléré, pourtant cela constitue une forme de marketing) mais les abus qui en résultent. C'est-à-dire faire du marketing agressif (panneaux publicitaires, publicité audiovisuelle) ou plus récemment inscrire ses services sur des sites tels que Groupon. Cependant, avec la réglementation ordinale de la profession, le code de déontologie interdit l'affichage des tarifs et la publicité à outrance sur les réseaux sociaux (annonce de tournées dans les groupes, publications sponsorisées etc.), ces personnes risquent d'être rappelés à l'ordre et sanctionnées. 

Les revenus, le "salaire"

 

 

 

 Sujet épineux... Qu'il est bien difficile de traiter. En auto-entreprise, il faut compter entre trois et cinq ans environ d'installation avant d'avoir des revenus réguliers corrects et surtout nets (à hauteur ou supérieur au SMIC) afin d'être indépendant financièrement. En sortant de l'école, ceux qui ont fait un prêt étudiant risquent d'avoir bien du mal à le rembourser sans coup de  pouce financier de la part des proches ou en ayant un job étudiant. Ainsi, il vaut mieux s'assurer un salaire fixe en travaillant à côté. Si dans le mois on n'a pas de clients, on ne paie pas de charges, c'est l'un des rares avantages de ce statut. Cependant, le maître mot reste la prévoyance : si un mois est prospère, il vaut mieux mettre de côté une partie du salaire pour parer à un éventuel déficit le mois suivant ou en cas d'accident de travail/maladie. Ne vous attendez pas à commencer votre vie avec un S.M.I.C mensuel garanti ou plus, cela ne sera certainement pas le cas lors de vos premiers mois ou premières années d'exercice, même si certaines écoles n'hésitent pas à faire miroiter un salaire plus que convenable sur leur site internet en début de carrière.  D'ailleurs, il semblerait que dans certaines régions, la saturation d'ostéopathes fait que certains doivent se résoudre à travailler au début pour très peu d'argent, voir gratuitement, afin de se faire connaître. Il ne faut pas non plus oublier que les préjugés ont la vie dure, pour certains clients "si c'est moins cher, c'est de mauvaise qualité" (et a contrario, "plus c'est cher, plus la personne est compétente" - et pourtant...), ou "un jeune n'a pas d'expérience donc je ne lui fais pas confiance" (alors que celui qui est expérimenté peut aussi être lassé par son métier et fournir des prestations de moins bonne qualité). Pendant vos premières années d'exercice, il vous faudra très certainement exercer un travail à temps partiel afin d'avoir un salaire fixe garanti. Ce qui signifie souvent devoir travailler tous les jours à cause du cumul de deux emplois, week-end et jours fériés compris.. Vous pouvez alors faire une croix sur votre vie de famille durant cette période là ! 

 

 Les 1 500€ bruts annoncés par certains sites en début de carrière sont une chimère, vous commencerez votre métier avec très peu de revenus (parfois moins de 500€ brut./mois), c'est la reconnaissance de votre travail qui fera que vous obtiendrez un salaire correct (...ou pas) dans les années qui suivront. 

  

Cela dit, lorsque notre patientèle est faite, il faut savoir prendre du temps pour soi et ne pas se laisser déborder par les personnes qui veulent tout et tout de suite, au détriment de notre vie personnelle, souvent pour des pseudo "urgences" qui sont pour la majorité des urgences de convenance : "Bibi boite depuis deux mois, il n'a pas vu le vétérinaire, c'est urgent", "Caramel ne pose plus la patte depuis deux semaines mais je préfère vous appeler d'abord car la visite vétérinaire est plus chère" (sauf que le diagnostic vétérinaire est indispensable dans ces cas là), "vous pouvez venir dimanche ? car les autres jours de la semaine je travaille et je ne peux pas être là avant 18h donc ça me fait tard", "si vous ne pouvez pas venir aujourd'hui j'appelle quelqu'un d'autre" (même si ça fait plusieurs années que vous suivez ses animaux et que vous avez toujours été conciliant sur la prise de rendez-vous), "j'ai oublié de vous appeler mais je suis en compétition dans deux jours"... Sans compter les demandes de rendez-vous (sans urgence) les jours fériés, le samedi ou le dimanche soir. Certaines personnes considèrent que comme ils vous paient, ils ont tous les droits, notamment de vous déranger pendant vos jours ou heures de repos, tandis que ça ne leur viendrait pas à l'idée de prendre l'appel de leur patron dans ces moments... Il y a aussi parfois la course à "celui qui réponds le plus vite", ou "celui qui viens le plus vite" (alors que vous avez perdu plusieurs dizaines de minutes au téléphone à conseiller/rassurer/écouter la vie de la personne au préalable, mais que vous ne pouvez venir qu'un jour après votre collègue). 

 

Le plafond de revenus de l'auto-entrepreneur pour les prestations non redevables de la T.V.A est environ à 38 000€/an (brut, cela ne représentera pas votre salaire réel, étant donné que vous devrez déduire vos charges mensuelles, vos frais d'entretien de la voiture, de carburant et de péage, vos assurances pour le véhicule et la RCP (qui je le rappelle, selon la couverture choisie, coûte en moyenne entre 300 et 800 € annuels pour la RCP), les frais de tenus de compte professionnel (environ 300€ à 500€ par an), le coût de votre site internet qui reste selon moi indispensable (une centaine d'euros par an) ; ce qui représente un revenu maximum d'environ 3100€ brut/mois. Au delà, vous êtes obligés de faire payer la T.V.A à vos clients (ce qui rajoute 20% supplémentaires au prix de la consultation, et pourrait vous faire perdre de la clientèle suite à l'augmentation soudaine et importante du prix de la consultation). Néanmoins, les praticiens réussissant à atteindre le plafond mensuellement sur une année sont très rares. Il faut également prendre en compte que votre deuxième métier sera plus ou moins être routier, cela sous entend changer régulièrement de véhicule (tous les cinq à six ans en moyenne si on choisi de le faire durer jusqu'au bout), sans compter les réparations/pneus/révisions etc. (ceux qui travaillent essentiellement en équin/bovin seront probablement ceux qui auront le plus de frais car les accès aux écuries sont parfois très chaotiques et abîment plus rapidement les suspensions, triangles etc. 

 

La plupart des ostéopathes animaliers sont des femmes. Pour celles qui veulent fonder une famille, il faut prévoir une éventuelle perte de clientèle suite à un congé maternité (durant le congé mais également après, si les personnes ont pris leurs marques avec le remplaçant et vous considèrent du coup moins disponible par rapport à votre vie de famille). Même s’il est possible de continuer à travailler sur des petits animaux durant cette période, il ne faut pas écarter les risques de transmission de maladie à cause du déficit immunitaire provoqué (toxoplasmose etc.). Et quand notre clientèle est composée majoritairement de gros animaux, c’est un grand manque à gagner. On peut toujours cotiser auprès d’assurances spécialisées pour garantir un revenu minimum, mais elles restent assez chères. Et sous le régime de l’auto-entrepreneur, ne comptez pas sur les congés payés… ils n’existent pas ! Donc quand vous partez en voyage, vous paierai non seulement son coût, mais également ce qui ne rentrera pas sur votre compte pendant cette période là (même si les clients sont généralement compréhensifs et acceptent souvent de reporter leur séance si votre absence n'est pas trop longue et qu'ils ne considèrent pas que c'est une urgence). Du coup, les congés de plus de 10 jours sont psychologiquement assez durs à prendre, notamment lors des premières années où l'on vit vraiment de ce travail (et puis on fini par s'y faire, en ayant travaillé sur son "lâcher-prise"...).

 

Les personnes déjà bien implantées dans le milieu auront évidemment plus de facilité à se faire connaître de la clientèle.  En plus de cela, le métier est en vogue et de plus en plus de personnes se forment pour en faire leur métier, malheureusement, la clientèle ne suit pas forcément. Donc en plus de se faire connaître, les professionnels doivent aussi faire face à l’arrivée de nouveaux confrères dans leur secteur qui travailleront sur la même clientèle. D'ailleurs, nous préférons généralement faire travailler nos connaissances (si la compétence suit, évidemment), du coup, si la famille/les amis de vos clients se forment également, vous perdrez probablement cette partie de  votre clientèle. Actuellement, dans la majorité des écuries où je travaille, il y a au moins une personne en formation ou sur le point d'entrer en formation. Si les ostéopathes humains ont de plus en plus de mal à vivre de leur métier, cela n'est pas différent pour les ostéopathes animaliers, d’autant plus que pour un animal de compagnie ou de loisirs qui va bien, la visite reste souvent annuelle.

 

Les écoles d'ostéopathies animales sont souvent très orientés sur l'ostéopathie équine. A ce jour, il n'est plus conseillé de se spécialiser en équin car la profession est clairement saturée dans le milieu hippique. Il est moins risqué d'envisager une pratique sur les animaux de compagnie et de production comme les bovins (l'ostéopathie bovine est en plein essor grâce aux éleveurs et producteurs laitiers qui font de plus en plus suivre leurs animaux afin d'éviter au maximum la médication et les pertes liées à cette dernière). Mais il faut garder à l'esprit que dans tous les cas, l'avenir du métier n'est pas aussi radieuse que certains le prétendent pour vendre leurs formations. 

 

Si certaines personnes parviennent à vivre de leur métier, il ne faut pas oublier que d’autres n’y parviennent plus ou n’y sont jamais parvenues.  J'ai "perdu" plusieurs collègues en cours de route (en seulement 8 ans d'exercice), que ce soit pour raison professionnelles (revenus insuffisants, réorientation), de santé (maternité, inaptitude physique), personnelles (changement de vie, refus ou incapacité de passer l'examen ordinal) etc. De ce fait, il est important d’anticiper son avenir dans le cas où malgré de nombreux efforts, l’activité ne prenne pas la tournure souhaitée. Par ailleurs, les manipulations étant physiques, il faut prendre en compte les risques d’accidents ou de maladie nous rendant l’exercice impossible. Lors des séances, il faut être vigilant aux réactions de l’animal, afin de limiter les risques de coup de pied, morsure ou griffure, qui existent malgré l'expérience et les techniques que l'on adapte. En huit ans d'exercice et pratiquement onze ans de pratique, j'ai à mon actif deux coups de pieds bien placés mais heureusement sans conséquences, une bonne cicatrice sur le tibia suite à une bousculade qui m'a valu 10 points de sutures, une morsure sans gravité et deux bonnes entorses cervicales grâce à deux chevaux pas très bien éduqués qui cette fois ont eu des séquelles. Donc en plus d'une bonne assurance professionnelle... il faut aussi penser à avoir une bonne couverture médicale et un bon confrère ostéopathe humain (que je consulte en moyenne trois fois par an...) :) 

Une journée type

Et bien… il n’y en a pas ! C’est un des atouts majeur du métier : pas de routine. Si la majorité de ma clientèle est composée d’équidés, il peut m’arriver de traiter des espèces diverses et variées. J’ai choisi de ne pas me spécialiser, mais il est tout à fait possible de ne traiter qu’une espèce en particulier. Après les chevaux, ce sont les chiens et les vaches (dans certaines régions) qui constituent une part plus importante du travail de l'ostéopathe. 

 

On peut être amené à travailler à côté de son lieu de domicile, ou à plusieurs centaines de kilomètres de celui-ci. La route ne me posait pas de soucis particuliers (même après 400km sur une journée) au début de ma carrière, mais après sept ans d'exercice, la lassitude (et les contraintes de l'emploi du temps) font que je restreint volontairement ma zone d'intervention pour l'éviter au maximum (maximum 2H30 de route en moyenne. Sur le long terme, cela peut constituer un désagrément, d’autant plus que le prix du carburant ne fait qu’augmenter et que l'entretien de la voiture constitue un budget important.

 

Lors des consultations, il est primordial de faire attention au positionnement de son corps afin de ne pas se blesser ou de cumuler la fatigue musculaire. Une hygiène de vie correcte est importante dans le métier, tout comme l’entretien musculaire, afin de pouvoir exercer pendant longtemps.  Nul besoin d’avoir un physique de rugbyman pour être ostéopathe, les animaux participent beaucoup à la séance et on se sert de leviers pour les manipulations. Après, je n’aurai pas craché sur 10cm et un peu de muscles supplémentaires ! D'ailleurs, les ostéopathes qui travaillent le plus avec les techniques "spectaculaires" (structurelles) sur les chevaux sont souvent ceux qui sont le mieux fichus d'un point de vue physique... 

 

Il ne faut pas oublier que l'ostéopathie est un métier d'extérieur principalement (à moins de se spécialiser uniquement dans les petits animaux), et qu'il faut aussi être conscient que l'on travaille dehors par tous les temps et ce, toute l'année. Donc pour les frileux, il faudra bien s'équiper et s'adapter aux aléas climatiques, que ce soit par -10° l'hiver ou plus de 40° l'été (vu à Nîmes il y a deux ans...). 


Il ne s’agit pas de décourager les nouveaux, mais de mettre en garde sur la réalité du métier qu’on occulte souvent.  Cela reste un métier passion très enrichissant et qui nous fait lever le matin avec le sourire ;)